«Aussi loin que l’on remonte le cours du temps, l’État républicain s’est toujours astreint à la quête permanente d’une adéquation entre ses modes et moyens d’actions ou d’intervention avec, d’une part le plein exercice de ses prérogatives légitimes et, d’autre part, la sauvegarde des droits et libertés des citoyens, ainsi que le bon accomplissement du service public tel que celui-ci est dû aux administrés ou aux usagers ». C’est en ces termes que s’exprimait M. Ousmane CAMARA, premier Médiateur de la République, pour justifier l’existence d’une Institution du Médiateur de la République au Sénégal.
Ainsi, le Médiateur, appelé aussi Ombudsman ou défenseur des droits autre part, est un entremetteur. En d’autres termes, c’est quelqu’un qui permet de mettre en accord (faciliter le dialogue entre) deux ou plusieurs parties ayant un différend afin de trouver une solution à l’amiable.
Conscients de son utilité dans le renforcement de L’État de droit, des pays anglo-saxons puis scandinaves en 1960 ont adopté cette Institution dans leur système d’organisation. Cependant, c’est la Suède en 1809 face au despotisme du Roi, qui a institué en premier un Ombudsman dont le rôle était de contrôler l’Administration en dehors des voies ordinaires de recours. C’est ce modèle suédois qui a servi de base pour les pays anglo-saxons et scandinaves.
En Afrique, ce sont les pays anglophones tels que le Ghana, le Nigeria, la Zambie, le Kenya et l’Afrique du Sud qui ont donné le ton en emboîtant le pas de la Grande Bretagne sur le modèle suédois. Ce n’est qu’à partir des années 1990, que quelques pays francophones d’Afrique vont installer leur Médiateur. Ainsi, le Sénégal est l’un de premiers pays de l’Afrique de l’Ouest à avoir instituer un Médiateur de la République.
C’est dans le cadre du programme de modernisation de L’État, que le gouvernement sénégalais a décidé d’instituer un Médiateur de la République en 1991 dans un souci de veiller au bon fonctionnement de l’Administration.
En effet, la protection des citoyens/usagers du Service Public a longtemps été confiée aux recours juridictionnels nationaux jugés inaccessibles et peu efficaces par les usagers.
L’institution du Médiateur a été créée par une loi n°91-14 du 11 février 1991 chargée d’améliorer les relations des citoyens avec l’Administration.
Cette loi a été abrogée et remplacée plus tard par une loi n°99-04 du 29 janvier 1999 dotant le Médiateur d’un statut lui permettant d’exercer sa mission dans de meilleures conditions.
Ainsi, cette loi de 1999 dans son article 2, a doté le Médiateur de la République, d’une « mission générale de contribution de l’environnement institutionnel et économique de l’entreprise, notamment dans ses relations avec les administrations publiques ou les organismes investis d’une mission de service public ».
En outre, cette même loi de 1999 lui confère un pouvoir d’auto-saisine. Ainsi, aux termes de l’article 9, «s’il l’estime utile, le Médiateur de la République, peut également entreprendre, de sa propre initiative toute démarche entrant dans le cadre de sa mission. Il en tient le Président de la République informé». Ce pouvoir est très important, car il permet au Médiateur d’agir surtout en cas de crises pouvant interrompre ou interrompant le service public.Il renforce ainsi, son indépendance et son autonomie dans le cadre de sa mission.
Son indépendance s’est aussi vue renforcée par cette même loi qui rend sa révocation quasi-impossible. En effet, le Médiateur de la République, qui est élu pour une période de six ans non renouvelable, ne peut être révoqué avant l’expiration de son mandat, qu’en cas d’empêchement constaté. La loi 1991 prévoyait que ce constat devait être fait par le Président de la Cour Suprême. Dans la loi 1999, le constat doit être fait par un collège présidé par le Président du Conseil constitutionnel et comprenant en outre, le Président du Conseil d’État et le Premier Président de la Cour de Cassation, saisi à cet effet, par le Président de la République (art. 5 de la loi 1999).
L’évolution de l’institution est allée au delà du renforcement de son indépendance et de l’élargissement de son pouvoir d’action. Ainsi, pour un meilleur traitement et une meilleure prise en compte des dossiers surtout ceux provenant des Collectivités, le Médiateur de la République, par un arrêté de 2004 a décentralisé l’Institution en mettant en place des correspondants régionaux. Il dispose également d’un réseau de correspondants dans plusieurs ministères.
Depuis un certain temps, le champ de compétence du Médiateur s’est, au fur et à mesure, implicitement élargi en adéquation avec les nouvelles exigences citoyennes. Son rôle de protection envers les usagers s’est étendu jusqu’à la défense des droits humains.